OM4 : l’évolution logique de la fibre optique
L’explosion de la demande au niveau de la bande passante des réseaux d’entreprises au cours des dernières années force l’industrie du câblage à se dépasser pour développer des technologies capables de suivre cette réalité. La vocation même de plusieurs de ces entreprises a littéralement changé, alors que les jeux vidéo sont devenus incroyablement réalistes, les fi las sont disponibles en 3D et presque 80 % de la population nord-américaine a un accès internet. Derrière ces phénomènes modernes, une multitude d’intervenants travaillent d’arrache pied dans le seul but de permettre une transmission effi cace des données.
Vous êtes-vous déjà demandé, par exemple, le nombre de fois qu’une seule séquence d’un jeu vidéo est transmise d’un développeur à un autre lors de la création d’un nouveau jeu? En sachant que cette séquence est de plusieurs dizaines de Mégaoctets et que des centaines de séquences comme celle-ci doivent être conçues, on peut s’imaginer l’importance de transmettre à des vitesses de plus en plus grandes et effi caces. Ou bien encore, le manufacturier qui développe une nouvelle pièce, le fera d’abord sur un logiciel spécialisé, très souvent même en 3D et par la collaboration de plusieurs ingénieurs qui doivent s’échanger les plans à travers le réseau de l’entreprise. Ce ne sont que quelques exemples qui expliquent pourquoi, entre autres, les centres de données se construisent à un rythme infernal et que les réseaux d’entreprises sont devenus beaucoup plus complexes et demandant, voire même cruciaux à la survie des dites entreprises.
Il ne suffit pas de dire : « Allons-y avec de la fibre. Il faut soigneusement choisir laquelle, en fonction des besoins actuels et futurs ».
La vitesse des réseaux
Alors qu’au début des années 2000 la majorité des usagers étaient connectés au réseau à des vitesses de 10Mbp/s, les équipements électroniques comme les commutateurs communiquaient entre eux dans l’ossature (communément appelé Backbone) à 100Mbp/s. Ensuite sont venus les cartes réseaux à 100 Mbps/s, alors que l’ossature a migré à une vitesse de 1Gbps, pour fi salement se rendre à aujourd’hui alors que les usagers communiquent entre eux à 1Gpbs et que l’ossature est maintenant rendue à 10Gbp/s et bientôt 40Gbps.
Quel type de fibre optique utiliser?
Tous ces besoins ont évidemment apporté de nouveaux besoins quant au type de fi bre optique qui doit être employée dans l’ossature. Trop de gestionnaires d’infrastructure ou d’intégrateurs ne portent pas une assez grande attention au type de fi are optique vs leurs besoins ou même la distance à parcourir. Il ne suffi t pas de dire : « Allons-y avec de la fi bre ». Il faut soigneusement choisir laquelle, en fonction des besoins actuels et futurs. Mais quelles sont les possibilités? La plupart d’entre vous qui avez eu à travailler avec de la fi bre optique savent qu’il y a deux types distincts de fi bre optique, soit multimode et monomode. Grosso Modo, nous savons que la fi bre monomode permet de plus grandes distances que la multimode. Pourquoi? Simplement parce que la fi bre multimode est conçue pour fonctionner avec des transmetteurs électroniques plus économiques, mais aussi moins précis et moins puissants. La source lumineuse, typiquement une diode, utilise une fi bre ayant un coeur beaucoup plus gros et diffuse le signal lumineux sur les parois du coeur en question. Le défaut de cette méthode est que lorsque le signal se heurte à ces parois, il est atténué plus rapidement, réduisant donc la distance possible. Parmi les types de câble optiques que l’on retrouve dans cette catégorie, il y a les OM1 (62.5/125 microns) et OM2 (50/125 microns).
En revanche, la fi bre monomode est conçue pour une transmission avec un laser. Bien que beaucoup plus dispendieux, le laser envoie un signal plus fi n, plus précis et plus puissant. De plus, le laser utilise le centre du coeur, évitant les réfl exions et ainsi l’atténuation trop rapide du signal. Alors, pourquoi ne pas utiliser la fibre monomode en tout temps? Simplement parce que les équipements construits avec des lasers sont de 3 à 4 fois plus chers que
ceux avec des diodes ou leurs dérivés (voir plus bas). Avec la vitesse grandissante des réseaux, les limites de la fi are optique multimode OM1 et OM2 ainsi que des transmetteurs aux diodes ont été atteintes. D’où l’apparition des transmetteurs de type VCSEL et la fi bre optique multimode optimisée pour le laser. Cette approche consiste à utiliser un transmetteur « hybride », à mi-chemin entre les diodes et le laser. Le VCSEL (Vertical Cavity Surface Emitting Laser, prononcé vixel) émet un signal beaucoup plus précis que les diodes traditionnelles, tout en étant conçu pour transmettre sur une fi are optique multimode. Les fi bres optiques multimode OM1 et OM2 ont été originalement conçues pour ralentir les modes voyageant au centre du coeur dans le but de les balancer avec ceux utilisant l’extérieur de celui-ci qui eux voyagent plus rapidement. Étant donné que le VCSEL utilise davantage le centre du coeur, les fi bres OM1 et OM2 ne sont pas idéales pour ce genre de transmetteur. D’où le besoin est venu de produire une fibre optimisée pour le laser, c’est-à-dire qui ne ralentit pas les modes au centre du coeur. La fi bre optique optimisée pour le laser, la OM3 est donc apparue.
Maintenant que se pointent à l’horizon des applications tels les 40Gb/s et 100Gb/s, il faut s’assurer que le câblage en place est en mesure de supporter ces vitesses, et ce, à des distances acceptables. Qu’est-ce qu’une distance acceptable? Et bien, partons du fait que selon des études réalisées par l’industrie, la majorité des liens d’ossatures installés sont à l’intérieur de 300 mètres, dans une proportion de 75 % environ. Il est donc de mise de garder cette idée de départ lorsque vient le temps de choisir un type de fi bre optique. L’industrie travaille depuis plusieurs années à produire un type de fi bre optique offrant une plus grande bande passante que celle offerte par la OM3. Cette dernière, selon les normes de l’industrie, doit permettre une bande passante de 2000 MHz/ km, alors que la OM4 est spécifi ée par la norme EIA/TIA 492AAAD à 4700 MHz-km. Principalement, l’objectif est de fournir une marge de manoeuvre additionnelle pour assurer le fonctionnement des nouvelles applications mentionnées plus haut. Bien entendu, tout cela dans les distances spécifiées pour chacune d’entre elles, soit 550 mètres pour le 10Gbps et 150 mètres pour le 40Gbps et 100Gbps.
Plus que juste la fibre OM4
En ce qui concerne le fonctionnement des applications à 40 et 100 Gbps, il ne s’agit pas seulement de mettre en place un câble de type OM4, loin de là. Les équipements de transmission et de réception du signal, tout en utilisant la technologie VCSEL comme méthode de transmission du signal doivent maintenant séparer le signal sur plusieurs canaux d’envoi sur le câble de fi bre optique. Le 40Gbps nécessitera un câble de 12 brins et transmettra sur 8 d’entre eux alors que le 100 Gbps utilisera un câble de 24 brins avec 20 en fonction. Il s’agit en fait d’additionner des canaux de transmissions de 10Gbps les uns aux autres, 4 fois pour le 40Gbps et 10 fois pour les 100 Gbps. Étant donné le nombre de brins de fi bre optique utilisés avec cette méthode, il est important de revoir la grosseur descâbles prévus lors de l’étape de planifi cation, car cela devient très différent des anciennes façons de faire qui utilisaient (ou utilisent encore…) 1 paire de fi bres par canal de transmission.
Pourquoi pas la fibre monomode?
La question qui devient inévitable, à la lumière de toutes ces nouvelles technologies, méthode de transmission, etc., est la suivante; ne serait-il pas plus sage d’installer de la fi are optique monomode, qui elle n’a pas ces limites et complexités? Et bien la tendance chez plusieurs clients ayant une infrastructure relativement imposante, tels les Universités, hôpitaux et autres, est de mettre en place des solutions hybrides. Le câble monomode n’est pas réellement plus cher que le multimode, c’est plutôt les équipements électroniques de transmission du signal qui le sont, tel que mentionné en début d’article. Une pratique de plus en plus commune est d’installer des câbles multimodes et monopoles, ce dernier étant en place pour des besoins futurs. Le câble multimode est utilisé au premier jour pour supporter les applications actuelles, alors que le câble monomode est gardé en réserve pour de futures applications plus demandantes et pour l’éventualité où le marché nous réserverait une baisse de coût des équipements électroniques pour la fi bre monomode.
Fibre optique à rayon de courbure plus prononcé
Une des contraintes physiques de la fi bre optique depuis qu’on l’utilise dans les infrastructures est sa fragilité à subir des abus au niveau de la fl exion ou de la courbure. Sans nécessairement endommager le câble ou le verre, une fl exion trop prononcée risque d’entraîner une atténuation du signal et ainsi compromettre le fonctionnement du système, surtout dans le cas de nouvelles applications plus sensibles au budget de perte de signal. L’industrie a donc élaboré des câbles multimode de 50/125 microns plus fl exiles optimisés pour les courbures (Bend Optimized Multimode Fiber). Ces câbles augmentent la fi abilité dans des conditions de courbures plus serrées. Le rayon de courbure permis se situe maintenant autour de 7.5mm, soit plus petit qu’une pièce de 10 sous! Ceci facilitera non seulement la tâche des installateurs, mais permettra l’installation dans des environnements traditionnellement moins propices à la fi bre optique tout en assurant l’intégrité du signal
Tout se passe au moment de la planifi cation
La fi bre OM3 ou OM4 semble donc devenir un choix de plus en plus évident lorsque vient le temps de concevoir ou de planifi er l’ossature d’un système de câblage structuré. Que vous soyez utilisateur ou intégrateur, il vaut la peine de vous questionner à ce sujet et de possiblement consulter un expert en la matière si vous n’êtes pas certain de vos choix. Les manufacturiers pourront aussi vous conseiller judicieusement sur le bon choix à faire, eux qui sont activement impliqués au niveau du développement des technologies et de l’élaboration des normes de l’industrie. Les spécialistes RCDD* sauront aussi vous conseiller et même procéder à l’élaboration de la solution complète de câblage au besoin.
Patrick Desnoyers, RCDD/NTS est président de X Solutions, une entreprise spécialisée dans la conception et l’intégration de systèmes de câblage structuré et fi bre optique. OEuvrant dans le milieu des télécommunications depuis plus de vingt ans, il détient les certifi cations RCDD et NTS de BICSI. Au cours de sa carrière, il a travaillé chez un important manufacturier, supportant plusieurs projets d’envergure au Canada et à l’étranger. Il a aussi contribué à plusieurs comités de développement des normes et poursuit son implication dans le but de faire évoluer le domaine du câblage structuré au Québec et au Canada.
Lire l'article original